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Bilan énergétique
de la France pour 2021
mars 2023

2.1 Le taux d’indépendance énergétique diminue en raison du rebond plus marqué de la demande que de la production

La production d’énergie primaire s’élève à 1 522 TWh en France entière en 2021, en hausse de 6,7 % par rapport à 2020, après une baisse de 8,6 % en 2020 (figure 2.1.1). Elle est tirée par la production nucléaire qui représente les trois quarts de la production primaire. Cette dernière rebondit (+ 7,2 %, à 1 150 TWh), sans retrouver son niveau de 2019 (1 209 TWh). La production nucléaire avait chuté en 2020 (- 11,3 %) en raison des restrictions sanitaires, de la contraction de la demande d’électricité et, dans une moindre mesure, de la fermeture de la centrale de Fessenheim. La disponibilité du parc nucléaire, en augmentation par rapport au point bas de 2020 et nettement plus élevée que sur les trois premiers trimestres 2022, reste parmi les moins bonnes observées depuis 1996. Cette situation est imputable, d’une part, aux effets rémanents de la crise sanitaire qui a perturbé les calendriers de maintenance et entraîné des retards de travaux et, d’autre part, à la détection à l’automne de défauts (microfissures sur des circuits auxiliaires) qui ont occasionné l’examen puis l’arrêt prolongé de réacteurs.

La production primaire d’électricité renouvelable, sensible aux conditions météorologiques et climatiques, diminue par rapport à 2020 (- 3,1 %, à 113 TWh) mais augmente de 8,1 % par rapport à 2019. La production hydraulique se replie (- 4,7 %) en raison d’un stock hydraulique en début d’année 2021 plus faible qu’en 2020 et de précipitations moins abondantes que l’année précédente au printemps et à l’automne. La production éolienne baisse également (- 7,6 %), pénalisée par des conditions de vent peu favorables une grande partie de l’année. La production de la filière photovoltaïque est, quant à elle, dynamique (+ 17,4 %), en raison principalement de l’accélération des capacités installées. Malgré son développement rapide, le photovoltaïque occupe encore une place mineure dans la production d’énergie primaire renouvelable électrique (14 %, contre 53 % pour l’hydraulique et 33 % pour l’éolien).

À l’inverse, la production primaire d’énergies renouvelables thermiques et issues de la valorisation des déchets progresse de 9,4 % sur un an et de 6,1 % par rapport à 2019, pour atteindre 250 TWh. Cette hausse est surtout imputable à la biomasse solide (+ 10,0 %, à 125 TWh), composée essentiellement de bois-énergie (112 TWh). Étant dédiée quasi exclusivement au chauffage, la biomasse solide est davantage consommée et produite lorsque les températures sont basses. Or l’hiver 2021 a été nettement plus rigoureux que l’hiver précédent, historiquement doux. La vitalité de la production des pompes à chaleur (+ 30,6 %, à 43 TWh) et de biogaz (+ 25,8 %, à 16 TWh) se renforce du fait de la forte croissance des installations. À l’inverse, la production de biocarburants continue de reculer (- 16,7 %, à 23 TWh), en dépit d’une demande plus soutenue en 2021. Elle est tirée à la baisse par le biodiesel.

La production primaire d’énergie fossile, pétrole brut extrait des bassins aquitain et parisien pour l’essentiel, est marginale (10 TWh).

Figure 2.1.1 : production primaire d’énergie

* Y compris énergies marines.
Source : SDES, Bilan de l’énergie

En 2021, la consommation primaire d’énergie en France rebondit nettement (+ 7,6 %) mais reste en dessous de son niveau de 2019 (- 2,5 %). La production primaire progressant moins vite que la consommation primaire, le taux d’indépendance énergétique de la France, rapport de ces deux grandeurs, diminue de 0,5 point en 2021, pour s’établir à 55,1 % (figure 2.1.2). Il se situe 0,4 point au-dessus de son niveau de 2019. L’approvisionnement pour satisfaire la demande d’énergie repose davantage en 2021 qu’en 2020 sur les importations, hors uranium, l’énergie nucléaire étant produite sur le territoire par convention statistique internationale (voir encadrés).

Le déficit des échanges physiques d’énergie s’accroît en effet de 7,7 %, après avoir diminué de 17,2 % en 2020 : il s’est ainsi réduit de 10,8 % par rapport à 2019. En particulier, les entrées nettes de gaz naturel sur le territoire progressent (+ 7,6 %, à 414 TWh), de même que celles de charbon (+ 21,7 %, à 72 TWh). Les achats de pétrole brut augmentent (+ 2,4 %) et les importations nettes de produits raffinés sont également en hausse (+ 7,0 %) à la faveur de la reprise de la circulation routière et aérienne. Les importations nettes de biocarburants, essentiellement du biodiesel, s’élèvent à 14 TWh et doublent par rapport à 2020 (+ 108 %). Le déficit des échanges extérieurs de bois à des fins énergétiques, multiplié quasiment par trois entre 2020 et 2021, reste marginal (2 TWh) par rapport à sa consommation. Le solde exportateur des échanges physiques d’électricité est stable et s’établit à 45 TWh malgré la reprise de la production électrique ; il est plus faible de 12 TWh par rapport à son niveau de 2019. Les importations d’électricité ont en effet été particulièrement soutenues les trois premiers mois de 2021 par rapport à l’année précédente, du fait de températures bien plus basses qu’en 2020 à la même période et d’une moindre sollicitation des centrales thermiques par rapport aux années antérieures, année 2020 exclue.

Figure 2.1.2 : taux d’indépendance énergétique, production et consommation primaires

Source : SDES, Bilan de l’énergie

La facture énergétique de la France s’élève à 44,0 milliards d’euros en 2021 (Md€) et équivaut quasiment au solde de l’ensemble de la balance commerciale, services compris (48,6 Md€). Elle augmente de 19,1 Md€ par rapport à 2020, en restant légèrement en dessous de son niveau de 2019 (45,3 Md€2021) - (figure 2.1.3). À l’augmentation du solde des échanges physiques vient s’ajouter l’intense renchérissement des énergies fossiles, notamment en fin d’année. Les prix ont progressé quasi continûment depuis mai 2020 et accéléré à partir de septembre 2021, entraînés à la hausse par la forte demande mondiale alors que la production est restée relativement contrainte. Le prix du gaz atteint des niveaux historiques en fin d’année 2021 ; le prix spot NBP à Londres est quasiment multiplié par cinq en moyenne entre 2020 et 2021. La facture gazière s’alourdit ainsi nettement, passant de 5,2 Md€2021 en 2020 à 13,5 Md€.

La facture pétrolière et en biocarburants, qui pèse pour près des trois quarts de la facture énergétique totale, augmente de 56 % en 2021 mais diminue de 16 % par rapport à 2019. Les importations nettes en pétrole brut s’accroissent de 5,8 Md€2021, pour s’établir à 15,6 Md€, alors que celles en produits raffinés et biocarburants s’alourdit de 5,9 Md€2021, à 16,2 Md€. Le charbon contribue également à la hausse de la facture énergétique, à hauteur de 0,5 Md€2021.

Le solde exportateur d’électricité, qui allège la facture globale, augmente de 1,5 Md€2021, pour atteindre 2,7 Md€ (+ 0,7 Md€2021 par rapport à 2019). Les prix spot de l’électricité ont été multipliés en moyenne par trois entre 2020 et 2021, tirés principalement par la hausse des prix du gaz, et par celle des quotas de CO2 sur le marché EU-ETS dans une moindre mesure.

Figure 2.1.3 : facture énergétique de la France

En milliards d’euros 2021

2017

2018

2019

2020

2021

Facture énergétique

41,3

48,0

45,3

24,9

44,0

Pétrole brut

22,2

25,6

21,9

9,7

15,6

Pétrole raffiné

8,4

11,4

14,0

9,8

14,9

Gaz naturel

9,1

11,3

9,0

5,2

13,5

Charbon

2,2

2,0

1,7

0,9

1,4

Biocarburants

0,8

0,7

0,8

0,4

1,2

Bois-énergie

0,0

0,0

0,1

0,1

0,1

Électricité

- 1,4

- 3,0

- 2,1

- 1,2

- 2,7

Source : SDES, Bilan de l’énergie, d’après DGDDI, CRE, enquête auprès de raffineurs

Le taux d’indépendance énergétique est sensible aux règles de comptabilité de l’énergie nucléaire

L’énergie primaire correspond à l’énergie tirée directement de la nature ou contenue dans les produits énergétiques tirés de la nature. Elle se distingue de l’énergie secondaire, obtenue à partir d’une énergie primaire ou d’une autre énergie secondaire. Ainsi, par exemple, l’électricité thermique est une énergie secondaire issue d’un combustible naturel, comme le charbon ou le gaz naturel, considéré comme énergie primaire. Dans le cas de l’énergie nucléaire, issue de la réaction de fission de l’uranium ou du plutonium, les conventions internationales sur les statistiques de l’énergie considèrent comme énergie primaire la chaleur issue de la réaction et non le combustible nucléaire lui-même. Cela a pour conséquence de comptabiliser comme production primaire (i.e. comme ressource nationale) la quantité de chaleur produite par les centrales nucléaires (qui est estimée à partir de l’électricité effectivement produite par celles-ci et d’un rendement théorique de 33 %). Le manuel sur les statistiques de l’énergie coédité par l’Agence internationale de l’énergie et par Eurostat souligne que, si l’origine du combustible nucléaire était prise en considération, « la dépendance de l’approvisionnement à l’égard d’autres pays serait accrue ». Dans le cas de la France, le taux d’indépendance énergétique perdrait 42 points de pourcentage, pour s’établir à 13 % en 2021, si l’on considérait comme énergie primaire le combustible nucléaire plutôt que la chaleur issue de sa réaction.

Échanges extérieurs d’uranium

Même si les combustibles utilisés par les centrales nucléaires ne sont pas retracés dans le bilan de l’énergie (encadré supra), ils sont nécessaires pour amorcer la réaction nucléaire.

En 2021, la France importe des matières nucléaires, à hauteur de 700 millions d’euros, essentiellement de l’uranium naturel et de l’uranium enrichi, et en exporte à hauteur de 620 millions (essentiellement de l’uranium enrichi de l’uranium appauvri).

L’approvisionnement en uranium naturel est diversifié avec des importations en provenance principalement du Niger, de la Namibie, du Canada, d’Australie, d’Ouzbékistan et du Kazakhstan. L’origine des importations est variable selon les années. En 2021, les importations en valeur progressent nettement en raison de l’augmentation des prix (qui doublent quasiment entre le début et la fin d’année). En 2021, la production de combustibles nucléaires sur le territoire est élevée (+ 7 % en 2021 par rapport à 2020 et + 17 % par rapport à 2019). Cette production est réalisée par Framatome en assemblant l’uranium enrichi par Orano sur le site de Pierrelatte avec des composants métalliques fabriqués en interne. Des assemblages combustibles sont également importés d’Allemagne, de Suède, du Royaume-Uni et d’Espagne.

La France est exportatrice nette d’uranium enrichi (figure 2.1.4). Ses principaux clients sont le Royaume-Uni, la Corée du Sud, les États-Unis, l’Allemagne et la Chine. L’uranium appauvri, sous-produit de l’enrichissement de l’uranium, est principalement importé d’Allemagne. On peut aussi observer des mouvements d’uranium appauvri entre la France et les Pays-Bas ; ces mouvements ne sont pas liés au fonctionnement du parc français.

Figure 2.1.4 : facture d’uranium

Source : DGDDI