1.6 Les prix des biocarburants importés augmentent fortement en 2022
En 2022, les prix à l'importation et à l'exportation du biodiesel s'élèvent respectivement à 1 974 €/tep et 2 019 €/tep, et ceux du bioéthanol respectivement à 1 707 €/tep et 1 826 €/tep (figure 1.6.1). Dans un contexte de forte croissance des prix de marché des carburants fossiles (cf. 1.2) et de pression sur les marchés des matières premières agricoles (notamment l'huile végétale), les prix à l'importation des deux produits augmentent de 66 % par rapport à 2021.Au premier semestre 2022, la guerre en Ukraine a entraîné une baisse de l'approvisionnement en huile de tournesol et, par suite, une demande accrue d'autres huiles (colza, soja, palme) qui a tiré les cours des huiles végétales à la hausse. Au second semestre, la diminution du prix du gazole a pesé sur le cours des huiles végétales et s'est répercutée sur le cours des esters méthyliques1.
Le prix à l'exportation du biodiesel augmente de 39 %, atteignant un record historique. Le prix à l'exportation du bioéthanol diminue (- 14 %), tout en restant à un niveau élevé, après avoir atteint un record en 2021, en raison notamment des difficultés d'accès aux ressources agricoles qui ont précédé la guerre en Ukraine2.
1 FranceAgriMer, Note de conjoncture biocarburants n° 7 et Note de conjoncture biocarburants n° 8.
2 Ifpen, Tableau de bord biocarburants 2022.
Figure 1.6.1 : prix moyens des biocarburants à l'importation et à l'exportation
En euros par tep
2012 |
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
|
Importations |
1 235 |
1 110 |
946 |
822 |
844 |
862 |
934 |
866 |
788 |
1 168 |
1 929 |
Bioéthanol |
1 403 |
1 239 |
1 217 |
1 016 |
873 |
944 |
1 005 |
982 |
767 |
1 028 |
1 707 |
Biodiesel |
1 194 |
1 096 |
926 |
798 |
842 |
857 |
930 |
854 |
792 |
1 190 |
1 974 |
Exportations |
1 347 |
1 194 |
1 129 |
1 026 |
877 |
1 002 |
948 |
956 |
956 |
1 540 |
1 990 |
Bioéthanol |
1 365 |
1 206 |
1 157 |
1 081 |
797 |
910 |
971 |
1 006 |
740 |
2 119 |
1 826 |
Biodiesel |
1 170 |
1 116 |
1 016 |
895 |
968 |
1 042 |
940 |
944 |
1 011 |
1 452 |
2 019 |
Source : SDES, Bilan de l'énergie, d'après DGDDI
Une fiscalité spécifique pour encourager le recours aux biocarburants |
Comme les prix des biocarburants sont supérieurs à ceux des produits pétroliers auxquels ils sont mélangés (le gazole pour le biodiesel et les supercarburants pour le bioéthanol), leur incorporation, qui vise à diminuer les émissions de CO2 du transport routier, engendre un coût pour la collectivité. Le partage de ce coût entre les consommateurs et l'État dépend de la fiscalité mise en place. Deux dispositifs fiscaux soutiennent le développement des carburants. Le premier est la taxe incitative relative à l'utilisation d'énergie renouvelable dans les transports (Tiruert) qui remplace depuis 2022 la taxe incitative relative à l'incorporation de biocarburants (Tirib). Ce dispositif incitatif fixe des objectifs d'incorporation de biocarburants au-delà desquels le montant dû au titre de cette taxe est nul pour le redevable. La seconde est l'accise sur les produits énergétiques autres que les gaz naturels et les charbons (anciennement TICPE, taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques), qui possède un tarif réduit pour les carburants à haute teneur en biocarburants (ED95, B100 et E85 notamment). |
En 2022, le prix moyen d'approvisionnement du biodiesel (figure 1.6.3) est supérieur de 67 % à celui du gazole fossile, à 2 120 €/tep contre 1 270 €/tep, tandis que celui des bioessences est supérieur de 86 % à celui de l'essence fossile (1 737 €/tep contre 934 €/tep). L'écart de prix entre les biocarburants et les carburants fossiles reste stable sur un an pour les bioessences et augmente pour le biodiesel. La crise énergétique a entraîné en effet une forte augmentation du prix d'approvisionnement à la fois des carburants fossiles et des biocarburants. Le surcoût effectif associé (cf. encadré) augmente et atteint 5,2 c€/l pour les bioessences et 5,1 c€/l pour les biodiesels (figure 1.6.2).
Figure 1.6.2 : surcoût effectif dû à l'incorporation des biocarburants par litre de carburant
Source : SDES, Bilan de l'énergie
Méthodologie de calcul du surcoût effectif d'incorporation des biocarburants |
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Le surcoût effectif d'incorporation des biocarburants est le rapport entre le coût total d'incorporation des biocarburants et la consommation de carburants routiers. Il représente, pour un litre de carburant routier, le surcoût moyen en euros que doit payer le consommateur. Il est calculé pour chaque type de carburant (essence et gazole). Le surcoût d'incorporation se calcule comme la différence entre le prix d'approvisionnement des biocarburants et des carburants fossiles, multipliée par la part de biocarburant dans la consommation totale de carburant (fossile et bio) en France métropolitaine. Le prix d'approvisionnement est un prix implicite qui rapporte la valeur de l'approvisionnement à la quantité correspondante (figure 1.6.2). L'approvisionnement est calculé en quantité et en valeur monétaire comme la somme de la production, du solde du commerce extérieur et du déstockage net. Il est exprimé en euros par tep (figure 1.6.3). Figure 1.6.3 : approvisionnement des carburants fossiles et des biocarburants par type de carburant (en euros courants)
Note : le montant monétaire de la production est calculé à partir des prix moyens à la production dans l'Union européenne publiés dans les Perspectives agricoles de l'OCDE et de la FAO pour le biodiesel et le bioéthanol. Le prix de production des bioessences est supposé égal à celui du bioéthanol. |
À partir de ces prix d'approvisionnement, il est possible d'estimer le coût de la tonne de CO2 évitée par l'incorporation de biocarburants. Pour cela, on considère que l'utilisation de biocarburant plutôt que de carburant classique permet de diminuer les émissions de CO2 entre 50 % (seuil de durabilité fixé par la législation européenne) et 100 %. Si l'on rapporte le surcoût du biocarburant par rapport au carburant classique aux émissions ainsi évitées, le coût de la tonne de CO2 évitée s'élèverait ainsi en 2022 entre 271 €/tCO2 et 541 €/tCO2 pour le biodiesel, et entre 262 €/tCO2 et 525 €/tCO2 pour le bioéthanol (figure 1.6.4). Ce coût augmente pour le biodiesel du fait de l'augmentation de l'écart de prix entre le fossile et le bio. Il stagne pour le bioéthanol. Les coûts estimés ici ne prennent pas en compte les émissions indirectes liées au changement d'affectation des sols ou à l'exploitation des produits agricoles et seraient supérieurs si c'était le cas.
Figure 1.6.4 : coût de la tonne de CO2 évitée par l'incorporation des biocarburants
Source : SDES, Bilan de l'énergie, d'après CPDP, DGDDI