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Bilan énergétique
de la France pour 2023
Avril 2025

2.1 Le taux d’indépendance énergétique augmente en raison du rebond de la production primaire

En 2023, la production d’énergie primaire s’élève à 1 421 TWh en France entière (cf. méthodologie), en hausse de 13,0 % par rapport à 2022 (figure 2.1.1). Elle reste néanmoins nettement en retrait par rapport à son niveau de 2021. En 2023, la croissance de la production primaire s’explique principalement par le rebond de la production nucléaire (+ 14,7 %, à 1 025 TWh). Du fait des mesures mises en place par EDF pour traiter le phénomène non prévu de corrosion sous contrainte identifié en 2021 sur certains réacteurs, la disponibilité du parc nucléaire s’améliore nettement en 2023 par rapport à 2022. Elle reste toutefois inférieure à celle observée en 2021 et en 2020.

La production primaire d’électricité renouvelable progresse fortement en 2023 (+ 24,6 %, à 129 TWh). Sa croissance d’une ampleur inédite résulte d’une très forte augmentation des capacités installées et de conditions météorologiques nettement plus favorables qu’en 2022. La production éolienne est particulièrement dynamique (+ 32,1 % en 2023, à 50 TWh) en raison de la progression du parc (+ 20 % de puissance installée en deux ans), avec notamment le raccordement de plusieurs parcs en mer de grande capacité en 2022 et 2023. Les conditions de vent ont également été très propices, notamment en fin d’année 2023. Sans retrouver son niveau de 2021, la production d’électricité hydraulique (57 TWh) progresse de 24,5 % en 2023, après avoir atteint un point bas en 2022 en raison de la sécheresse. Grâce au développement des installations (+ 15 % de capacités installées en 2023), la production de la filière photovoltaïque s’accroît également (+ 11,2 %, à 22 TWh) en dépit d’un ensoleillement moins généreux qu’en 2022.

La production primaire d’énergies renouvelables thermiques et issues de la valorisation des déchets repart à la hausse (+ 2,2 %), pour atteindre 257 TWh. La production des pompes à chaleur augmente nettement (+ 11,4 %, à 50 TWh) en raison d’une progression toujours soutenue des équipements malgré une légère inflexion dans les ventes. La production de biogaz (+ 16,4 %, à 22 TWh) ralentit légèrement mais reste très dynamique. En raison d’un automne légèrement plus rigoureux, la production de biomasse solide progresse légèrement (+ 0,8 %, à 123 TWh). À l’inverse, la production de biocarburants continue de diminuer (- 2,7 %, à 21 TWh), tirée à la baisse par le biodiesel (- 4,3 %). En croissance depuis 2021, la production d’énergie à partir de déchets industriels et ménagers, dont une partie est renouvelable, recule en 2023 (- 9,3 %).

La production primaire d’énergie fossile, pétrole brut extrait des bassins aquitain et parisien pour l’essentiel, est marginale (10 TWh).

Figure 2.1.1 : production primaire d’énergie

* Y compris énergies marines.
Source : SDES, Bilan de l’énergie

La production primaire augmentant plus vite que la consommation primaire, le taux d’indépendance énergétique de la France, rapport de ces deux grandeurs, gagne 5,6 points, pour s’établir à 56,3 % (figure 2.1.2). L’approvisionnement pour satisfaire la demande d’énergie repose moins en 2023 qu’en 2022 sur les importations, hors uranium, l’énergie nucléaire étant produite sur le territoire par convention statistique internationale (cf. encadrés). Le déficit des échanges physiques d’énergie, à 1 175 TWh, diminue en effet de 12,0 %. En 2023, la France redevient exportatrice nette d’électricité (50 TWh, contre - 15 TWh en 2022).

Les entrées nettes5 de gaz naturel sur le territoire se replient (- 19,6 %, à 339 TWh) du fait de la diminution de la consommation et, dans une moindre mesure, du niveau relativement élevé des stocks en début d’année. Les importations de gaz gazeux nettes du transit diminuent (- 18,2 %), tout comme celles de gaz liquéfié (- 15,7 %). Le GNL représente désormais 59 % des importations, une part équivalente à 2022 (58 %) et nettement supérieure à celle des années antérieures (35 % en 2021). La Norvège est le premier fournisseur (un tiers du gaz naturel importé) devant les États-Unis (un quart) et la Russie (environ un huitième). Les exportations de gaz naturel restent à un niveau élevé en 2023 (140 TWh), en lien avec la forte croissance des importations de GNL qui sont en partie réexportées, sous forme de gaz gazeux, vers les autres pays européens.

Les achats de pétrole brut augmentent (+ 10,5 %, à 540 TWh) tandis que les importations nettes de produits raffinés diminuent (- 15,2 %, à 271 TWh). L’embargo sur le pétrole russe conduit à une modification des approvisionnements : la Russie, qui fournissait 5,2 % des importations de pétrole brut et 16,2 % du pétrole raffiné en 2022, ne représente plus que 0,2 % des importations de pétrole raffiné en 2023 (0 pour le pétrole brut).

Les importations nettes de biocarburants, essentiellement du biodiesel, s’élèvent à 20 TWh (+ 13,4 %). Le déficit des échanges extérieurs de bois à des fins énergétiques augmente nettement en 2023 (+ 24 %) mais reste marginal (3 TWh) par rapport à sa consommation.

5 Il sʼagit des importations de gaz sur le territoire français (y compris du gaz naturel liquéfié porté), nettes des exportations et du transit.

Figure 2.1.2 : taux d’indépendance énergétique, production et consommation primaires

Source : SDES, Bilan de l’énergie

La facture énergétique de la France s’élève à 71,4 milliards d’euros (Md€) en 2023, après avoir atteint un niveau record à 123,9 Md€2023 en 2022 (figure 2.1.3). Elle reste néanmoins élevée et se situe, en euros constants, quasiment à son niveau de 2014, avant la forte décrue du prix du pétrole des années 2014-2016. La quasi-division par deux de la facture par rapport à 2022 (- 52,5 Md€2023) s’explique par le reflux du prix des énergies fossiles sur les marchés, qui avait brutalement augmenté fin 2021 et en 2022 en raison des tensions géopolitiques liées à la guerre en Ukraine. Le prix de gros du gaz naturel, qui avait atteint des sommets en 2022, diminue très nettement en 2023 mais reste supérieur à son niveau d’avant-crise, à 39 euros le MWh PCS (pouvoir calorifique supérieur). La facture gazière est divisée par deux : elle passe de 50,0 Md€2023 en 2022 à 26,3 Md€ en 2023.

La facture pétrolière et en biocarburants, qui pèse pour les deux tiers de la facture énergétique totale en 2023, diminue de 24,8 %. Le montant des importations nettes en produits raffinés et biocarburants s’allège de 9,5 Md€2023, à 19,8 Md€ en 2023, tandis que les dépenses en pétrole brut diminuent de 6,0 Md€2023, pour s’établir à 27,1 Md€. Le charbon contribue également à la baisse de la facture énergétique, à hauteur de - 1,5 Md€2023. L’électricité allège la facture de 4,0 Md€ alors qu’elle contribuait à son alourdissement à hauteur de 7,8 Md€2023 en 2022.

Figure 2.1.3 : facture énergétique de la France

En milliards d’euros 2023

2019

2020

2021

2022

2023

Facture énergétique

50,0

27,3

49,4

123,9

71,4

Pétrole brut

24,0

10,7

17,0

33,1

27,1

Pétrole raffiné

15,3

10,6

16,2

26,0

16,6

Gaz naturel

9,8

5,6

15,9

50,0

26,3

Charbon

1,9

1,0

1,5

3,4

2,0

Biocarburants

1,3

0,6

1,7

3,3

3,3

Bois-énergie

0,1

0,1

0,1

0,2

0,2

Électricité

- 2,3

- 1,3

- 2,9

7,8

- 4,0

Source : SDES, Bilan de l’énergie, d’après DGDDI, CRE, enquête auprès de raffineurs

Le taux d’indépendance énergétique est sensible aux règles de comptabilité

L’énergie primaire correspond à l’énergie tirée directement de la nature ou contenue dans les produits énergétiques tirés de la nature. Elle se distingue de l’énergie secondaire, obtenue à partir d’une énergie primaire ou d’une autre énergie secondaire. Ainsi, par exemple, l’électricité thermique est une énergie secondaire issue d’un combustible naturel, comme le charbon ou le gaz naturel, considéré comme énergie primaire.

Dans le cas de l’énergie nucléaire, issue de la réaction de fission de l’uranium ou du plutonium, les conventions internationales sur les statistiques de l’énergie considèrent comme énergie primaire la chaleur issue de la réaction et non le combustible nucléaire lui-même. Cela a pour conséquence de comptabiliser comme production primaire (i.e. comme ressource nationale) la quantité de chaleur produite par les centrales nucléaires (qui est estimée à partir de l’électricité effectivement produite par celles-ci et d’un rendement théorique de 33 %). Le manuel sur les statistiques de l’énergie coédité par l’Agence internationale de l’énergie et par Eurostat souligne que, si l’origine du combustible nucléaire était prise en considération, « la dépendance de l’approvisionnement à l’égard d’autres pays serait accrue ». Dans le cas de la France, le taux d’indépendance énergétique perdrait 36 points de pourcentage, pour s’établir à 16 % en 2023, si l’on considérait comme énergie primaire le combustible nucléaire plutôt que la chaleur issue de sa réaction.

En outre, le taux d’indépendance ne suffit pas à donner une vision complète en matière énergétique en rapportant consommation et production primaire. Pour compléter cette approche, on peut également s’intéresser à la transformation d’énergie primaire en énergie finale. La France produit sur son sol les deux tiers des produits raffinés consommés par les utilisateurs finaux (même si elle recourt à du pétrole brut quasi intégralement importé pour cette production). La consommation finale en chaleur commercialisée, en électricité et en énergies renouvelables thermiques et déchets est aussi intégralement ou quasi intégralement produite sur le territoire français (cf. partie 3 sur la transformation).

Échanges extérieurs d’uranium

Même si les combustibles utilisés par les centrales nucléaires ne sont pas retracés dans le bilan de l’énergie (cf. encadré supra), ils sont nécessaires pour amorcer la réaction nucléaire.

Les échanges extérieurs d’uranium retracent les achats et ventes des entreprises nucléaires françaises, y compris pour la transformation de l’uranium et la production de combustibles nucléaires au profit de clients étrangers. Les quantités et origines destinées au fonctionnement du parc nucléaire français ne sont pas isolées.

En 2023, la France importe des matières nucléaires, à hauteur de 1,4 milliard d’euros, essentiellement de l’uranium naturel et de l’uranium enrichi, et en exporte à hauteur de 1,7 milliard d’euros (essentiellement de l’uranium enrichi).

En 2023, du fait de la hausse des prix de ce combustible, la facture en uranium naturel est multipliée par 2,7 après s’être repliée en 2022. L’approvisionnement en uranium naturel est diversifié avec des importations en provenance principalement du Kazakhstan, de la Namibie, du Niger et d’Australie en 2023 (figure 2.1.4). L’origine des importations varie selon les années.

La France est exportatrice nette d’uranium enrichi (figure 2.1.5). Ses principaux clients sont les États-Unis, la Corée du Sud, la Suède, le Japon et le Royaume-Uni.

L’uranium appauvri, sous-produit de l’enrichissement de l’uranium, est principalement importé auprès de pays européens (Allemagne, Suède, Suisse).

La production de combustibles nucléaires sur le territoire diminue nettement en 2023 (- 19,9 % par rapport à 2022). Cette production est réalisée par Framatome (site de Romans-sur-Isère) en assemblant l’uranium enrichi par Orano sur le site de Pierrelatte avec des composants métalliques fabriqués en interne. Des assemblages combustibles sont également importés de Suède, du Royaume-Uni et d’Espagne.

Figure 2.1.4 : répartition des importations d’uranium en valeur par pays en 2023

Source : DGDDI

Figure 2.1.5 : facture d’uranium

Source : DGDDI