Des pressions humaines de plus en plus fortes sur la biodiversité
L’Homme utilise les ressources naturelles pour subvenir à ses besoins. Il dépend étroitement des écosystèmes naturels qui lui procurent nourriture, matériaux, énergie, régulent les réserves d’eau et le climat, et qui sont source de bien-être et d’activités touristiques. La pression subie par les écosystèmes est telle que beaucoup d’habitats naturels et d’espèces sont aujourd’hui en déclin.
Selon la troisième évaluation des habitats naturels, 20 % seulement des habitats d’intérêt communautaire présents en métropole sont dans un état favorable sur la période 2013-2018, avec des disparités relativement fortes entre les territoires. Lors de la précédente évaluation, portant sur la période 2007-2012, 22 % des habitats d’intérêt communautaire étaient alors dans un état favorable. Selon la dernière évaluation nationale des sites humides emblématiques, 41 % des sites humides étudiés ont vu leur état se dégrader entre 2010 et 2020.
État de conservation des habitats d’intérêt communautaire par région biogéographique, sur la période 2013-2018
En %
Note : résultats tous habitats confondus (297 évaluations).
Champ : France métropolitaine.
Sources : rapportage DHFF ; Patronat (OFB-CNRS-MNHN), janvier 2020. Traitements : Patronat ; SDES, 2020
En 2023, 16 % des espèces évaluées dans la Liste rouge nationale sont éteintes ou menacées. En France métropolitaine, entre 1989 et 2021, les populations d’oiseaux communs spécialistes des milieux agricoles ont baissé de 36 %, celles des milieux bâtis de 33 % et des milieux forestiers de 2 %. Entre 2006 et 2021, la population des chauves-souris les plus communes a diminué de 43 %.
Proportion d’espèces éteintes ou menacées dans la Liste rouge nationale en 2023
En %
Note : groupes taxonomiques considérés = mammifères, oiseaux nicheurs (hors espèces visiteuses strictes ou nicheuses probables), reptiles, amphibiens, poissons d'eau douce, poissons récifaux, requins, raies et chimères (Sélaciens), crustacés terrestres et d'eau douce, papillons de jour, phasmes, mantes, coléoptères, chauve-souris, abeilles, mollusques d'eau douce, coraux constructeurs, flore vasculaire. La liste des groupes évalués dépend des territoires.
Sources : listes rouges pour la France métropolitaine et ultramarine, Patrinat (OFB-CNRS-MNHN) ; UICN, Comité français, décembre 2022. Traitements : SDES, septembre 2023
L’une des principales causes de ces évolutions est la dégradation des milieux naturels. Ainsi, près de 60 000 hectares de prairies, pelouses et pâturages naturels ont été perdus par artificialisation entre 1990 et 2018 en métropole (source Corine Land Cover). Les pratiques agricoles intensives de même que la déprise agricole et la fermeture des espaces ouverts menacent la biodiversité.
Le changement climatique affecte aussi la biodiversité. L’acidification des océans qui en résulte menace notamment les récifs coralliens. Selon le dernier bilan de l’Initiative française pour les récifs coralliens (Ifrecor) portant sur l’état de santé corallien de plus de 200 stations de surveillance, la situation des récifs coralliens reste contrastée entre les territoires français. Soumis à une forte pression démographique et largement anthropisé, les territoires des Antilles françaises (Guadeloupe, Martinique, Saint-Barthélémy, Saint-Martin) et de l’océan Indien (Mayotte, La Réunion), aux superficies plus réduites, abritaient des coraux considérés dans un état dégradé dans 62 % des stations en 2020. À l’inverse, plus isolés, moins densément peuplés, mais plus vastes, les territoires du Pacifique (Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, Polynésie française et Clipperton) et les îles Éparses se portaient mieux, avec un état dégradé du corail dans seulement 30 % des stations. Ces disparités se sont renforcées au cours des dernières années : entre 2015 et 2020, le corail a connu une dégradation dans 33 % des stations des Antilles françaises, de Mayotte et de la Réunion contre 15 % des stations du Pacifique.
Autre facteur d’érosion de la biodiversité, 60 des 100 espèces considérées mondialement comme les plus envahissantes sont déjà présentes dans les départements et territoires d’outre-mer.
Les actions en faveur de la biodiversité
Face aux pressions et menaces pesant sur les écosystèmes, de nombreuses initiatives sont engagées à tous les niveaux. Des mesures de protection ont ainsi été mises en place sous l’impulsion de stratégies de création d’aires protégées.
En mars 2023, la France métropolitaine compte 6 043 espaces protégés articulés autour de 17 outils de protections terrestres. Parmi ceux-ci figurent les protections réglementaires (ou protections fortes au sens de la SNAP1) comprenant les cœurs de parcs nationaux, les réserves naturelles (nationales, régionales ou de Corse), les arrêtés de protection (de biotope, de géotope ou d’habitats naturels), ainsi que les réserves biologiques. En 2023, ces dispositifs couvrent 8 743 km² (soit 0,95 % de l’emprise terrestre et maritime de la France métropolitaine). D’autres catégories de dispositifs de préservation (protection conventionnelle comme les parcs naturels régionaux, actions de maîtrise foncière, réseau européen Natura 2000) complètent cet arsenal.
Évolution des surfaces terrestres et maritimes couvertes par certains types d’aires protégées, en France métropolitaine
En surface (km²)
Note : les protections réglementaires regroupent les cœurs de parcs nationaux, les réserves naturelles (nationales, régionales ou de Corse), les réserves nationales de chasse et de faune sauvage, les réserves biologiques (intégrales et dirigées) et les arrêtés de protection (biotope, géotope et d'habitats naturels).
Les surfaces prises en compte pour les sites Natura 2000 correspondent aux surfaces cumulées ZSC et ZPS : la forte hausse des surfaces couvertes par le réseau Natura 2000 entre 2016 et 2020 s’explique par la création de 12 aires marines.
Champ : espaces terrestres et maritimes.
Sources : MNHN (SPN) ; INPN (bases espaces protégés et Natura 2000). Traitements : SDES, 2023
La situation de certaines espèces s’améliore grâce, entre autres, à la mise en place de plans nationaux d’action (PNA). C’est notamment le cas d’espèces semi-aquatiques, comme la loutre ou le castor, ou des oiseaux d’eau hivernants, dont les populations ont progressé de 109 % entre 1980 et 2023. Emblématiques des interactions entre l’Homme et la nature, le loup gris, le lynx boréal et l’ours brun, trois espèces protégées inscrites sur la Liste rouge nationale des espèces menacées (respectivement vulnérables, en danger et en danger critique) ont recolonisé certains massifs montagneux après avoir complètement disparu du territoire métropolitain. L’ours brun demeure toutefois l’espèce la plus vulnérable, avec près de 90 individus dans le massif pyrénéen identifiés début 2023 (+ 29 % par rapport à 2021). Cette reconquête engendre cependant des conflits avec le secteur du pastoralisme, d’où l’instauration d’un système d’indemnisation des attaques de troupeaux (4,54 millions d’euros en 2020) et l’autorisation, à titre dérogatoire, de l’abattage d’un quota de loups (jusqu’à 21 % de prélèvement de la population lupine).
Évolution de la proportion du territoire métropolitain sur lequel chaque espèce de grands prédateurs est régulièrement présente
En %
Source : OFB, réseaux loup-lynx et ours brun. Traitements : OFB, juillet 2022
Chaque année, la protection de la biodiversité bénéficie de moyens financiers dédiés. En 2021, un total de 3,3 milliards d’euros a été affecté à différentes opérations telles que la restauration de milieux naturels, la réintroduction d’espèces menacés ou la gestion d’espaces protégés. Ces fonds sont principalement issus de financements publics. L’Etat et les collectivités locales contribuent à près des deux tiers (62 %), suivis par les entreprises (18 %) et les ménages et associations (14 %). L’Europe participe également à hauteur de 6 %, via des fonds européens, tels que le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER).
Suite à la crise sanitaire de 2020, les dépenses allouées à la biodiversité ont rebondi, enregistrant une hausse record de 14 %, largement soutenue par l’augmentation des financements publics, en particulier dans le cadre du plan France Relance.
Évolution du financement des dépenses de protection de la biodiversité et des paysages
En millions d’euros courants
Note : révision des séries de financement sur la période 2000-2020, suite à la réévaluation des dépenses et des financements des associations de protection de la nature.
Champ : France.
Source : SDES, compte satellite de l'environnement, 2023
Une mobilisation citoyenne
La prise de conscience et la mobilisation de la société progressent également. Le nombre de citoyens s’engageant dans des programmes de sciences participatives sur la biodiversité a fortement augmenté, passant de 20 000 participants actifs en 2011 à plus de 115 000 en 2022 (avec un léger ralentissement depuis 2020 probablement lié au Covid). L’objectif de ces programmes est notamment d’obtenir des données sur la nature et la biodiversité, produire des outils de sensibilisation et d’éducation à la nature et former une communauté pour mobiliser les citoyens autour d’enjeux liés à la biodiversité.
Données
Données associées à l'article
Cet article fait partie de la publication « Bilan environnemental de la France – Édition 2023 » qui propose une vue d'ensemble des dépenses de protection de l’environnement, ainsi qu’un aperçu de l’état des écosystèmes et des interactions entre l’environnement et l’économie.
Ces fiches thématiques abordent les grands enjeux et l’état des connaissances des principaux domaines environnementaux : milieux naturels, exposition aux risques, économie verte, consommation de matières, émissions de gaz à effet de serre, énergies renouvelables, etc.
Ce panorama, au travers d’indicateurs physiques et monétaires, mobilise de nombreuses sources et met en perspective les évolutions récentes sur ces domaines.
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