Pas d’amélioration de la qualité des eaux en nitrates
Les milieux aquatiques accumulent les surplus résultant de la fertilisation minérale et organique des cultures. Après avoir beaucoup augmenté entre les années 1970 et 1990, la quantité totale d’azote vendue, ramenée à l’ensemble des surfaces fertilisables, a fluctué autour de 85 kg par hectare de surface fertilisable (kg/ha) entre le début des années 1990 et la fin des années 2010 (contre 57 kg/ha pour la campagne 1972-1973). Depuis la campagne 2018/2019, la tendance est à la baisse avec une quantité qui passe en dessous des 70 kg/ha. Les plans d’aide aux agriculteurs, les actions mises en œuvre dans les zones vulnérables et les mesures visant à mieux valoriser les effluents d’élevage permettent progressivement de lutter contre le lessivage des nitrates.
Les nitrates sont, avec les pesticides, les polluants les plus détectés dans les eaux souterraines de l’Hexagone. L’indice des teneurs en nitrates dans les nappes souterraines est relativement stable entre 2000 et 2022 à l’échelle de l’Hexagone. Des variations peuvent être liées aux fluctuations interannuelles des précipitations, avec des concentrations plus faibles pendant les années sèches et des concentrations élevées pendant les années de fortes pluies, les précipitations favorisant le lessivage des nitrates stockés dans les sols.
Évolution des indices nitrate et phosphore total
Indice base 100 en 2000
Note : RCS : réseau de contrôle de surveillance ; RCO : réseau de contrôle opérationnel ; AEP : adduction d’eau potable.
Champ : France métropolitaine ; Pour les eaux souterraines : réseau de surveillance RCS/RCO/AEP ; seules les stations de surveillance des masses d'eau les plus proches de la surface sont prises en compte dans ce calcul ; Pour les eaux superficielles : réseau de surveillance RCS/RCO.
Source : système d'information sur l'eau, base de données ADES et Naïades. Traitements : SDES, 2024
Toutefois, le niveau de contamination des nappes présente de fortes disparités territoriales, la moitié sud de l’Hexagone étant globalement moins contaminée. Près de 24 % des masses d’eau les plus proches de la surface des bassins Loire-Bretagne, Rhin-Meuse, Artois-Picardie et Seine-Normandie dépassent la concentration de 40 mg/litre contre 8 % dans la moitié sud. Dans les départements et régions d’outre-mer (DROM), aucune masse d’eau ne dépasse 40 mg/l, toutes ayant des concentrations comprises entre 10 et 25 mg/l.
Concentration en nitrates dans les eaux souterraines sur la période 2019-2022
Champ : réseau de surveillance RCS/RCO/AEP ; seules les stations de surveillance reliées aux masses d'eau les plus proches de la surface sont prises en compte dans ce calcul.
Source : système d'information sur l'eau, base de données ADES. Traitements : SDES, 2024
Dans les cours d’eau, les concentrations en nitrates sont stables entre 2000 et 2023, ainsi que sur la dernière décennie (environ 15 mg/l). Les valeurs les plus élevées s’observent sur une grande moitié nord de la France métropolitaine, notamment en Bretagne et en Normandie.
Les concentrations en phosphore total ont diminué d’environ 40 % entre 2000 et 2023. Après avoir fortement baissé entre 2000 et 2013 (- 53 %), elles augmentent légèrement entre 2013 et 2018 puis se stabilisent depuis 2018 pour atteindre 0,12 mg/l. Comme dans le cas des nitrates, la plupart des zones les plus atteintes sont situées au nord.
Concentrations en nitrates et en phosphore dans les cours d’eau sur la période 2021-2023
Champ : tout réseau confondu.
Source : naiades.eaufrance.fr. Traitements : SDES, 2024
De nombreuses substances quantifiées dans les eaux
En 2022, les ventes de produits phytopharmaceutiques (ou pesticides) s’élèvent à près de 68 000 tonnes de substances actives. Plus de 95 % sont destinées à un usage agricole, faisant de la France le premier utilisateur de pesticides en Europe en volume et le dixième rapporté à sa surface agricole.
Sur la période 2020-2022, 22 départements totalisent plus de la moitié de la quantité de substances actives achetées, hors substances autorisées en agriculture biologique et en biocontrôle. Les cinq plus gros acheteurs sont la Somme, l’Eure-et-Loir, la Charente-Maritime, le Pas-de-Calais et l’Aisne.
La surveillance de la qualité des cours d’eau et des nappes souterraines montre que les pesticides sont présents dans la plupart des sous-bassins. Les concentrations les plus élevées sont mesurées dans les zones de grandes cultures, d’arboriculture et de viticulture. Seuls les territoires montagneux ou constitués de surfaces agricoles moins traitées, telles que les prairies permanentes, sont moins contaminés.
Les achats de substances actives hors usage en agriculture bio et hors biocontrôle en moyenne triennale par département, sur la période 2020-2022
Notes : la qualité des données ne permet pas d’analyser l’évolution des achats au sein des départements d’outre-mer. Ainsi, pour la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion, ce sont les bilans des ventes qui ont été pris en compte.
Source : Banque nationale des ventes par les distributeurs, données sur les achats au code postal des acheteurs et des ventes au code Insee des distributeurs extraites pour les données 2009 à 2019 le 27 novembre 2020 et les données 2020 le 17 octobre 2022 et les données 2021 et 2022 le 21 octobre 2023. Traitements : OFB et SDES, 2024
Dans les cours d’eau et plans d’eau, les principales substances quantifiées sont les herbicides et leurs produits de dégradation en France métropolitaine, et les insecticides et leurs métabolites en outre-mer. L’indice des pressions toxiques cumulées des pesticides (IPTC) dépasse 1 sur toutes les tailles de cours d’eau et sur environ la moitié des sites de mesure depuis 2008.
Les situations les plus dégradées s’observent sur la moitié nord de l’Hexagone et en Martinique. Ces pressions sont essentiellement dues, en France métropolitaine, à cinq herbicides d’usage agricole et, en outre-mer, à trois herbicides et un insecticide, dont certains ont été interdits d’usage avant 2018.
Part des cours d’eau surveillés dont l’IPTC-pesticides dépasse 1 sur la période 2020-2022
Notes : le cumul des pressions toxiques exercées par les pesticides est considéré comme élevé lorsque l’IPTC (indice des pressions toxiques cumulées) dépasse 1 ; résultats provisoires.
Sources : Eaufrance ; Ineris. Traitements : SDES, 2024
Les eaux souterraines sont également affectées par les pesticides que ce soit en France métropolitaine ou dans les DROM. Les territoires ultramarins sont confrontés à la fois aux insecticides et herbicides. En France métropolitaine, ce sont principalement des herbicides avec leurs métabolites qui sont retrouvés dans les différentes masses d’eau souterraines. Sur les 782 pesticides surveillés en France métropolitaine sur la période 2019-2022, 588 ont été quantifiés au moins une fois dans les eaux souterraines.
Dans les DROM, sur cette même période, sur les 689 pesticides, 160 ont été quantifiés au moins une fois.
Parmi les pesticides les plus quantifiés aussi bien en France métropolitaine que dans les DROM, on retrouve des substances (et leurs métabolites) interdites depuis plusieurs années comme l’Atrazine, interdit depuis 2003, mais massivement utilisé pendant 40 ans.
Top 15 des pesticides et de leurs métabolites les plus quantifiés dans les eaux souterraines de France métropolitaine sur la période 2019-2022
En %
Note : en bleu, métabolite ; en vert, substance mère herbicide ; en jaune, substance mère fongicide.
Champ : France métropolitaine ; réseau de surveillance RCS/RCO/AEP ; seules les stations de surveillance des masses d'eau les plus proches de la surface sont prises en compte dans ce calcul ; seules les substances présentant un taux de recherche supérieur à 80 % sont retenues.
Source : système d'information sur l'eau, base de données ADES. Traitements : SDES, 2024
Top 15 des pesticides et de leurs métabolites les plus quantifiés dans les eaux souterraines des DROM sur la période 2019-2022
En %
Note : en bleu, métabolite ; en vert, substance mère herbicide ; en jaune, substance mère fongicide ; en orange, substance mère insecticide.
Champ : DROM ; réseau de surveillance RCS/RCO/AEP ; seules les stations de surveillance des masses d'eau les plus proches de la surface sont prises en compte dans ce calcul ; seules les substances présentant un taux de recherche supérieur à 80 % sont retenues.
Source : système d'information sur l'eau, base de données ADES. Traitements : SDES, 2024
La surveillance des eaux souterraines porte également sur d’autres micropolluants comme les PFAS (per- et polyfluoroalkylées), les substances pharmaceutiques, les métaux ou d’autres composés physico-chimiques. Les analyses conduites sur la période 2019-2022 révèlent également leur présence dans les eaux souterraines.
Substances suivies et quantifiées sur la période 2019-2022 dans les eaux souterraines en France par groupe de substances
En nombre
Note : DROM = département et région d’outre-mer ; FM = France métropolitaine
Champ : France ; réseau de surveillance RCS/RCO/AEP ; seules les stations de surveillance des masses d'eau les plus proches de la surface sont prises en compte dans ce calcul.
Source : système d'information sur l'eau, base de données ADES. Traitements : SDES, 2024
La dégradation de la qualité de l'eau, 1re cause de fermeture des captages
En 2024, la France compte 37 795 captages actifs et destinés à la production d’eau potable (adduction collective publique : 32 549, adduction collective privée : 3 369 ; activité agroalimentaire : 1 373, eau conditionnée : 275 ; usage thermal : 229). 36 230 d’entre eux prélèvent l’eau dans les eaux souterraines.
Chaque année, ce patrimoine se réduit du fait de l’abandon de certains équipements. Ainsi, sur la période 1980-2024, près de 14 300 captages ont été fermés.
La première cause d’abandon sur cette période incombe à la dégradation de la qualité de la ressource en eau (32,1 % des situations). Les autres motifs concernent la rationalisation des réseaux de production et de distribution (23,9 %), des problématiques administratives (15 %), des débits de production trop faibles (8,7 %), des dégradations ou une vétusté trop importante des équipements (7 %) ou l’impossibilité d’assurer la protection de la ressource (5,4 %). La cause de l’abandon n’est pas connue pour 4,6 % des cas.
Parmi les captages abandonnés en raison de la dégradation de la qualité de la ressource sur la période 1980-2024, 41,1 % le sont du fait de teneurs excessives en nitrates et/ou pesticides, 23,4 % pour des raisons de microbiologie, 7,2 % du fait de présence d’arsenic, 6,5 % pour des excès de turbidité de l’eau et 21,7 % à cause d’autres paramètres en excès (hydrocarbures, sulfates, solvants, fer, manganèse, sélénium, fluorures et fluor, etc.).
Évolution du nombre de captages d’alimentation en eau potable fermés sur la période 1980-2024 et leurs principaux motifs d’abandon
En nombre de captages
(p) = provisoire.
Notes : par simplification, le motif d'abandon « Qualité autres paramètres » regroupe l'arsenic, les hydrocarbures et les autres paramètres non cités ; le motif d'abandon « Rationalisation ou assimilé » regroupe les motifs Rationalisation, Administratif, Débit, Technique, Vétusté, Dégradé, Captage improtégeable.
Champ : France ; captages eaux souterraines et superficielles.
Source : Ades, extraction au 16 décembre 2024, Système d’information sur l’eau. Traitements : SDES, 2024
L’assainissement des eaux usées, principal poste de dépenses pour lutter contre la pollution
En France, un large éventail de mesures est financé par les acteurs économiques (ménages, entreprises, administrations publiques, associations) pour lutter contre la pollution des eaux, qu’elles soient superficielles ou souterraines. L’assainissement des eaux usées, la prévention et la surveillance des pollutions des sols et des masses d’eaux, ainsi que la dépollution des sites et sols pollués, sont autant d’initiatives visant directement à éviter ou réduire cette pression sur les milieux naturels.
En 2022, un montant de 16,2 milliards d’euros a été alloué à ces objectifs, excluant la protection des eaux marines. L’assainissement des eaux usées apparaît comme le principal domaine de dépenses dans la lutte contre la pollution des eaux en France, représentant 87 % du montant total alloué à cette cause.
Sur les cinq dernières années, les moyens financiers déployés pour lutter contre la pollution des eaux ont augmenté de 1,3 % par an en moyenne, en dépit de la baisse de 4,6 % observée en 2020, pendant la crise sanitaire. Cette baisse s’expliquait principalement par une chute des investissements dans le domaine de l’assainissement (- 11 %) à cause des périodes de confinement.
Évolution des dépenses engagées pour lutter contre les pollutions des eaux superficielles et souterraines (hors eaux marines)
En milliards d’euros courants
Note : les données excluent les dépenses consacrées à la surveillance et à la dépollution des eaux marines, à l'exception des efforts déployés pour lutter contre la prolifération des algues vertes, ainsi que les dépenses associées à la connaissance et la surveillance des sols.
Champ : France.
Source : SDES, compte satellite de l'environnement, 2024
Données
Données associées à l'article
Cet article fait partie de la publication « Bilan environnemental de la France – Édition 2024 » qui propose une vue d'ensemble des dépenses de protection de l’environnement, ainsi qu’un aperçu de l’état des écosystèmes et des interactions entre l’environnement et l’économie.
Ces fiches thématiques abordent les grands enjeux et l’état des connaissances des principaux domaines environnementaux : milieux naturels, exposition aux risques, économie verte, consommation de matières, émissions de gaz à effet de serre, énergies renouvelables, etc.
Ce panorama, au travers d’indicateurs physiques et monétaires, mobilise de nombreuses sources et met en perspective les évolutions récentes sur ces domaines.
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