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Le trafic maritime en France : baisse du fret en 2023

Transports
Publié le 18/07/2024
En 2023, le volume total de fret transitant par les ports français de métropole et d’outre-mer se chiffre à 326,1 millions de tonnes : il est en baisse de 4,3 % par rapport à 2022. Malgré un dynamisme entre 2021 et 2022, le trafic maritime de fret peine à retrouver les niveaux d’avant la crise sanitaire. Le tonnage total transitant par les ports de commerce français est supérieur de 0,5 % à celui de 2021 et demeure inférieur de 9,3 % à celui de 2019.

Repli du trafic maritime de fret

En 2023, la chute du trafic de conteneurs (- 12,8 %) et de vracs solides (- 13,3 %) explique principalement la baisse du tonnage total de fret ayant transité dans les ports français (- 4,3 %). Le trafic de vracs liquides se stabilise (+ 0,0 %), tandis que celui des rouliers repart à la hausse (+ 4,4 %) après plusieurs années consécutives de baisse.

 

Évolution du trafic maritime selon le type de fret depuis 2015
En millions de tonnes

© SDES

Champ : France hors Mayotte.
Source : SDES

 

Entre 2022 et 2023, la majorité des ports de commerce français sont concernés par la baisse du trafic total de fret, à l'exception du port de Calais, qui bénéficie de la hausse des échanges transmanche.

Les grands ports maritimes (GPM), exposés à la concurrence des ports européens et dépendants du trafic généré par les industries lourdes implantées sur leurs zones industrialo-portuaires, ont été plus touchés par la baisse du trafic que les ports décentralisés.

 

Répartition du trafic maritime selon le type de fret en 2023
En %

© SDES

Champ : France hors Mayotte.
Source : SDES

Stagnation du trafic de vracs liquides

En 2023, le trafic maritime de vracs liquides, qui compte pour 41,9 % du tonnage total, stagne (+ 0,0 %) après une forte augmentation des importations de gaz naturel liquéfié (GNL) par voie maritime en 2022.

Le trafic de pétrole brut augmente de 9,9 %, tandis que celui de pétrole raffiné stagne (- 0,3 %). Au total, le trafic tous pétroles confondus augmente de 4,6 %. Bien que frappé par le mouvement social contre la réforme des retraites, le secteur du raffinage a été moins fortement impacté en 2023 qu’en 2022, année où des raffineries et des dépôts pétroliers furent complètement mis à l’arrêt au cours de l’automne en raison de revendications salariales. Par ailleurs, la raffinerie de Donges (Nantes-Saint-Nazaire) n’a redémarré qu’en mars 2022, après 16 mois de mise à l’arrêt. L’augmentation des importations de pétrole brut engendre une hausse du trafic maritime intérieur de pétrole raffiné des ports raffineurs vers les ports stockeurs.

Le trafic de GNL diminue de 13,6 % après avoir fortement augmenté entre 2021 et 2022 (+ 65,4 %). Cette baisse du trafic de GNL s’explique par la diminution de la consommation réelle de gaz naturel en France (- 11,7 % par rapport à 2022). L’augmentation de la production d’électricité d’origine nucléaire et renouvelable a conduit à une moindre sollicitation des centrales à cycles combinés au gaz.

En 2023, la part des importations maritimes de GNL sur les importations totales de gaz naturel en France augmente légèrement par rapport à 2022 (95 %, contre 90 % un an auparavant). Elle était de 20 % en 2015 et de 50 % en 2021. Les sanctions européennes sur le gaz naturel russe, dont une part importante était acheminée par gazoducs, ont donc conduit à une augmentation de la part du gaz naturel importé par voie maritime.

Le trafic des autres vracs liquides (engrais, monoalcools, huiles végétales, produits chimiques organiques et inorganiques…) augmente légèrement (+ 0,7 %).

 

Évolution du trafic maritime de vracs liquides depuis 2015
En millions de tonnes

© SDES

Champ : France hors Mayotte.
Source : SDES

Chute du trafic de vracs solides

En 2023, le trafic de vracs solides, qui compte pour 18,2 % du tonnage total, impacté par la réduction de l’activité sidérurgique, consommatrice de charbon et de minerais, ainsi que par un taux d’utilisation plus faible des centrales à charbon dans le mix électrique français, chute de 13,3 %. L’abandon progressif du charbon dans la production électrique française est le principal facteur de la baisse tendancielle de trafic de vracs solides depuis 2018.

Le trafic de charbon se replie fortement (- 35,6 %) en 2023. La centrale thermique de Cordemais a été moins sollicitée qu’en 2022, ce qui a provoqué une baisse du trafic de charbon transitant par le port de Nantes-Saint-Nazaire. Le trafic de charbon a également fortement baissé à La Réunion pour la troisième année consécutive en raison de la conversion au 100 % biomasse des centrales thermiques de Bois-Rouge et de Le Gol.

La baisse du trafic de charbon est également due à une réduction d’activité dans la filière sidérurgique française. La filière métropolitaine a dû faire face à une baisse de la demande européenne en acier. De plus, un incendie au sein du complexe sidérurgique dunkerquois a mis à l’arrêt le haut fourneau numéro 4 pendant trois mois.

La baisse de l’activité sidérurgique a également impacté le trafic de minerais en 2023 (- 18,7 %).

Le trafic de produits agricoles baisse également (- 13,1 %) du fait de la chute du trafic céréalier (- 18,7 %). Cette baisse est en partie due à une plus grande disponibilité des blés ukrainiens sur les marchés mondiaux. Le trafic de nourritures animales (principalement des tourteaux de soja) a quant à lui augmenté de 12,0 %.

Le trafic des autres solides en vrac repart à la hausse (+ 4,7 %), en raison de l’augmentation des importations de laitiers, sous-produits de la métallurgie qui ont manqué à la suite de l’arrêt de certains hauts fourneaux. Parmi les autres solides en vrac, le trafic d’engrais baisse (- 2,8 %), en raison d’une baisse des exportations françaises due au prix élevé du gaz naturel, principale matière première nécessaire à la fabrication des engrais azotés de synthèse.

 

Évolution du trafic maritime de vracs solides
En millions de tonnes

© SDES

Champ : France hors Mayotte.
Source : SDES

Déclin du trafic de conteneurs

En 2023, le trafic de conteneurs, qui compte pour 15,6 % du tonnage total, chute de 12,8 % (en tonnes) et de 12,5 % en nombre de conteneurs en équivalent (EVP). Mis à part en 2020, année fortement impactée par la crise sanitaire, de tels niveaux n’avaient pas été atteints depuis 2016.

La réduction des flux de conteneurs a également touché la plupart des ports de commerce européens (- 6,0 % en moyenne sur l’ensemble des grands ports européens hors France – Source DGITM). La diminution du trafic de conteneurs a été plus forte dans les ports français de métropole (- 13,3 % en tonnage) que dans les ports d’outre-mer (- 10,0 % en tonnage).

Les causes de la baisse du trafic de conteneurs en France sont multiples. D’une part, le ralentissement de l’activité économique, conséquence de l’inflation et des taux d’intérêts élevés, a participé à réduire la consommation des ménages en biens manufacturés. À cette baisse de la consommation s’est ajoutée une réduction des stocks de produits manufacturés, constitués par les entreprises courant 2022 face à une consommation déjà en berne. D’autre part, les grèves contre la réforme des retraites au premier semestre 2023 ont impacté les activités de transbordement. Les armateurs ont alors préféré déporter une partie de leur trafic de conteneurs sur d’autres ports européens.

 

Évolution du trafic maritime de conteneurs depuis 2015
En millions de tonnes (à gauche) et millions d’EVP (à droite)

© SDES

Champ : France hors Mayotte.
Source : SDES

Hausse du trafic de rouliers

En 2023, le trafic maritime de rouliers, qui représente 22,3 % du tonnage total, augmente de 4,4 %, porté par la hausse du trafic transmanche (+ 6,3 %). Celui-ci compte pour 80 % du trafic total de rouliers transitant par les ports français. En revanche, le trafic méditerranéen, qui représente 12 % du trafic total de rouliers, se replie de 4,0 % après deux années de forte hausse.

Le trafic de rouliers transmanche est tiré par l’augmentation des volumes de marchandises transportées par camion dans les ports de la façade Manche-Mer du Nord (+ 5,3 %). À cette hausse s’ajoute l’augmentation du trafic de véhicules de particuliers et d’autocars (+ 28,9 %), conséquence d’une reprise des flux touristiques entre la France et la Grande-Bretagne, amorcée en 2022 et confirmée en 2023. Malgré ces hausses, le trafic de rouliers transmanche n’a pas rattrapé les niveaux d’avant crise sanitaire.

Côté Méditerranée, le trafic de rouliers affectés au transport de marchandises stagne (+ 0,3 %) tandis que le trafic de véhicules de particuliers et d’autocars chute (- 21,1 %), en raison d’une saison estivale en demi-teinte pour la Corse qui a enregistré une baisse des touristes français en 2023.

 

Évolution du trafic maritime de rouliers depuis 2015
En millions de tonnes

© SDES

Champ : France hors Mayotte.
Source : SDES

Trafic de fret variable dans les principaux ports maritimes

La part de chaque type de trafic varie fortement d’un port à l’autre, en fonction des spécificités des zones industrialo-portuaires. Les grands ports maritimes, administrés par l’État, concentrent les filières des vracs liquides et des conteneurs, avec également une forte part du trafic de vracs solides. Les ports décentralisés, administrés par les collectivités territoriales, sont en général spécialisés dans le transport de rouliers et, dans une moindre mesure, de vracs solides.

En 2023, l’ensemble des grands ports maritimes de métropole connaissent une baisse de trafic de fret :

  • le tonnage total transitant par le port d’Haropa recule de 4,4 % en raison de la forte baisse du trafic de produits agricoles  (- 14,2 %) et de conteneurs  (- 13,3 %). Ces baisses n’ont pas été compensées par la hausse des vracs liquides transitant par le port (+ 5,0 %) ;
  • le trafic total du port de Marseille baisse de 7,7 %, du fait de la chute du trafic de charbon (- 47,1 %), de minerais (- 15,1 %), de conteneurs (- 14,0 %) et de rouliers (- 12,0 %) ;
  • le trafic total du port de Nantes Saint-Nazaire baisse de 4,1 % à cause du recul du trafic de produits agricoles  (- 12,8 %) et de charbon (- 68,0 %) ;
  • le trafic total du port de Dunkerque se replie de 10,6 % en raison de la baisse du trafic de pétrole raffiné  (- 20,7 %), de GNL (- 13,6 %), de produits agricoles (- 23,5 %) et de conteneurs  (- 14,9 %) ;
  • le trafic total du port de Bordeaux diminue de 5,4 %, tout comme celui du port de La Rochelle (- 10,7 %), en raison de la chute de leurs trafics de produits agricoles (- 26,8 % et - 24,0 % respectivement).

À rebours de cette conjoncture, le port décentralisé de Calais affiche une hausse de son trafic total (+ 10,7 %) grâce à l’augmentation du trafic de rouliers (+ 11,2 %), ces derniers comptant pour la quasi-totalité des tonnages de fret transitant par le port. La situation est plus contrastée pour les autres ports décentralisés de métropole dont le trafic total baisse  (- 2,3 %), du fait de la diminution du trafic de vracs liquides  (- 6,0 %), des autres vracs solides  (- 5,9 %), des conteneurs  (- 15,0 %) et des rouliers  (- 1,0 %).

Le trafic baisse également dans les ports d’outre-mer  (- 3,7 %) en raison de la diminution du trafic de conteneurs  (- 10,0 %). Cependant, le port de Martinique affiche une hausse de son trafic total  (+ 10,5 %), qui s’explique par la forte augmentation du trafic de vracs liquides  (+ 30,5 %) transitant par le port.

 

Les ports de commerces français de marchandises et leurs tonnages en 2023

© SDES

Notes : trafic de fret (marchandise + tare) total embarqué et débarqué dans les 37 ports de commerce français de métropole et des départements et régions d’outre-mer (DROM) hors Mayotte. Les GPM sont des ports sous tutelle de l’État tandis que les ports décentralisés sont sous tutelle des collectivités territoriales. Certaines données restent provisoires et peuvent encore être sujettes à des révisions.
Données disponibles au 31 mai 2024
Champ : France hors Mayotte.
Source : SDES

Auteur : Achille BAUER, SDES

Définitions

  • Conteneurs : regroupe tous les produits transportés à l’intérieur des conteneurs de plus de 20 pieds. Le tonnage inclut la tare des conteneurs en plus du poids de la cargaison contenue.
  • EVP : acronyme d’équivalent vingt pieds. Unité approximative de mesure basée sur le volume d'un conteneur de 20 pieds, qui représente la taille standard dans le transport des marchandises conteneurisées. Par exemple, un conteneur standard de 20 pieds correspond à 1 EVP, tandis qu’un conteneur standard de 40 pieds correspond à 2 EVP.
  • Rouliers : dit également « RoRo ». Inclut les marchandises contenues dans les véhicules de transport qui sont chargés sur les navires de commerce. Ce sont généralement des véhicules routiers (camions, remorques et semi-remorques…), plus rarement des wagons de chemin de fer ou des barges. Les véhicules destinés à la vente sont également comptés dans cette catégorie. Comme pour les conteneurs, la tare des véhicules est incluse dans le tonnage.
  • Tare : inclut uniquement le poids à vide (ou masse à vide), d'un véhicule ou d'une unité de transport intermodal.
  • Tonnage total : inclut le tonnage des marchandises avec leurs emballages ainsi que la tare des unités de rouliers et de conteneurs servant au transport de ces marchandises.
  • Vracs liquides : regroupe tous les produits directement transportés sous forme liquide dans des navires adaptés (pétroliers, méthaniers, chimiquiers…).
  • Vracs solides : regroupe tous les produits à l’état solide ou de granulats qui ne sont pas emballés ou arrimés, et qui sont directement transportés en grande quantité dans les soutes de navires spécialisés (en général des vraquiers).

Données

Données associées à l'article sous forme de tableaux et graphiques et données brutes sous forme de tableaux.