L’hydrogène pur (à 98 % ou plus) est un vecteur énergétique encore peu produit et utilisé. Mais il suscite un intérêt croissant pour la décarbonation de plusieurs usages et secteurs à condition d’être produit à partir de procédés faiblement émetteurs en gaz à effet de serre, tels que l’électrolyse de l’eau en utilisant de l’électricité à faible contenu carbone. Très léger et présent à l’état naturel, l’hydrogène utilisé en France n’est actuellement pas extrait et doit faire l’objet d’une production. Il est actuellement obtenu principalement à partir de combustibles fossiles. Il est considéré comme un vecteur énergétique secondaire, comme l’électricité ou la chaleur vendue.
Une production totale de près de 250 000 tonnes
L’hydrogène pur peut être produit pour être commercialisé ou produit par des entreprises, énergétiques ou non, pour leur usage propre ou encore produit de manière fatale dans des processus industriels (c’est-à-dire sans être réutilisé directement à des fins énergétiques ou non énergétiques).
L’hydrogène est commercialisé par une dizaine d’unités légales en France. En 2023, la production vendue d’hydrogène pur s’élève à 64 000 tonnes, soit 2,1 TWh. Cette production diminue de 13 % par rapport à 2022 (73 000 tonnes).
L’hydrogène produit par des entreprises pour leur usage propre ou produit de manière fatale dans des processus industriels concerne 181 000 tonnes (6 TWh) en 2023. Contrairement aux quantités vendues, les quantités autoconsommées augmentent nettement par rapport à 2022 (+ 34 %).
Les sites de raffinage de pétrole produisent des gaz qui contiennent de l’hydrogène. S’ils ne sont pas épurés, ces gaz sont déjà pris en compte dans les statistiques de l’énergie en tant que produits pétroliers (gaz de raffineries) et ne sont pas comptabilisés en tant qu’hydrogène pur (voir sources et méthodes). Selon les raffineurs, seuls 73 000 tonnes d’hydrogène pur sont produites en 2023 par les sites de raffinage. Parmi elles, seules 29 000 tonnes (1 TWh) sont ensuite utilisées pures* pour le processus de raffinage et la production de chaleur.
Les cokeries déclarent, quant à elles, ne produire que des mélanges de gaz contenant de l’hydrogène (des gaz de cokeries, classés comme produit du charbon dans le bilan de l’énergie) qu’elles n’épurent pas.
Les industriels hors branche énergie, dans la chimie essentiellement, produisent de l’hydrogène pour 108 000 tonnes en 2023, soit 3,6 TWh, qu’ils utilisent pour leurs besoins propres (autoconsommation).
* Les quantités produites non utilisées pures et non vendues sont considérées alors comme mélangées.
Ressources d’hydrogène pur en 2023
En milliers de tonnes
Sources : EACEI ; EAPE ; enquête auprès des raffineurs. Calculs SDES
Une production principalement obtenue à partir de gaz naturel
Malgré le développement de projets de production d’hydrogène bas-carbone, l’hydrogène pur produit en 2023 provient très majoritairement de procédés émetteurs en CO2.
L’essentiel des quantités (70 %) est obtenu à partir du gaz naturel (méthane) à travers le vaporeformage (SMR) et l’oxydation partielle sans capture de carbone. Le vaporeformage ou l’oxydation partielle à partir de méthane avec un procédé de capture et de stockage du carbone est utilisé pour 10 % de l’hydrogène produit.
L’électrolyse est encore très peu utilisée (9 %) pour la production de quantités significatives. Au sein de l’électrolyse, le procédé chlore-soude, qui génère les plus grandes quantités, concerne un nombre très restreint de producteurs.
La production d’hydrogène à partir de produits pétroliers et d’autres procédés (à partir de méthanol principalement) est faible (moins de 10 % des quantités produites)
Production par mode
En milliers de tonnes
Sources : EAPH ; EACEI ; enquête auprès des raffineurs. Calculs SDES
Des échanges extérieurs encore très limités
Le stockage et le transport de l’hydrogène sont encore très peu développés en raison de l’absence d’infrastructures conséquentes (sites de stockages et réseaux de transport) et d’enjeux spécifiques pour ce vecteur (faible densité, risques d’explosion ou de fuites).
Les sites de production sont donc implantés près des sites de consommation. Dans ce contexte, les importations d’hydrogène sont encore très limitées (1200 tonnes en 2023) tout comme les exportations (1400 tonnes en 2023), mais elles augmentent par rapport à l’année précédente. En 2022, les quantités échangées étaient en effet encore plus faibles : 1100 tonnes ont été importées et 700 tonnes ont été exportées.
Des usages centrés sur le raffinage de pétrole, la fabrication d’engrais, et la production de chaleur
L’hydrogène pur, acheté ou autoconsommé, est principalement utilisé pour la désulfurisation des produits pétroliers lors du processus de raffinage (21 000 tonnes en 2023, soit 0,7 TWh), la production de chaleur des bâtiments industriels et des sites de raffinage (49 000 tonnes, soit 1,6 TWh) et les usages non énergétiques (100 000 tonnes soit 3,3 TWh), concentrés pour 95 % dans le secteur de la chimie (dont chimie organique). L’hydrogène est notamment utilisé pour la fabrication d’engrais.
La production d’électricité et la mobilité sont encore très peu concernées en 2023 par ce vecteur. Utilisé sous forme liquide depuis plusieurs décennies pour propulser Ariane, l’hydrogène fait toutefois l’objet d’investissements pour la mobilité lourde, en particulier sous la forme de carburants de synthèse dans l’aviation et le transport maritime.
L’hydrogène est actuellement utilisé de manière très marginale dans le transport fluvial et le transport routier (50 bus, moins de 10 poids lourds, un peu moins de 200 camionnettes, un peu plus de 50 fourgons ou véhicules aménagés et près de 900 véhicules particuliers avec des piles à hydrogène au 1er janvier 2024 selon le répertoire statistique des véhicules routiers RSVERO). Les stations de recharge sont principalement implantées en Normandie, Île-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes et près de Nantes, proche des sites de production.
Les pertes et mélanges s’élèvent à près de 57 000 tonnes, soit 1,9 TWh. L’essentiel provient des quantités produites par les raffineries qui ne sont pas utilisées pures et sont donc considérées comme mélangées à d’autres gaz.
Usages d’hydrogène pur en 2023
En %
Sources : EACEI ; EAPE ; enquête auprès des raffineurs. Calculs SDES
Sources et méthodes
Les estimations s’appuient sur plusieurs sources administratives et enquêtes existantes :
- enquête annuelle de production (EAP) conduite par l’Insee pour les quantités produites commercialisées ;
- enquête sur la consommation dans l’industrie (EACEI) de l’Insee, pour la consommation dans les établissements industriels hors branche énergie (dont production pour autoconsommation) ;
- enquête auprès des raffineries du SDES qui retrace les ressources en hydrogène et les emplois avec un détail des modes de production et des usages ;
- enquête annuelle sur la production d’électricité (EAPE) du SDES, pour la consommation d’hydrogène pour la production d’électricité ;
- données douanières de la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) pour les échanges extérieurs.
Une première enquête auprès des sites producteurs d’hydrogène (EAPH, enquête annuelle sur la production d’hydrogène) a été réalisée en 2023 et a été élargie en 2024 à davantage de sites. Elle permet de connaître les quantités par mode de production et d’estimer la consommation d’énergie pour sa production.
Les sites commercialisant l’hydrogène ont été principalement ciblés pour ces premières éditions, l’enquête annuelle sur la consommation d’énergie dans l’industrie fournissant des informations sur les quantités produites pour être autoconsommées.
Les quantités d’hydrogène utilisées pour la mobilité sont estimées à partir notamment des capacités des stations, faute d’informations précises et homogènes. Les quantités relatives aux usages énergétiques des raffineries et aux mélanges ou pertes sont déduites des autres informations déclarées.
L’hydrogène étant encore très peu produit et utilisé, il peut être moins bien mesuré et déclaré, surtout lorsqu’il est coproduit et n’est pas fabriqué pour être vendu. En outre, dans le cas des estimations au travers d’enquêtes par sondage, des erreurs liées à l’échantillonnage peuvent exister. Ces erreurs peuvent être importantes au regard des quantités estimées. Enfin, l’ensemble des établissements fabriquant de l’hydrogène n’est pas connu de manière certaine. Les estimations présentées dans cette publication sont amenées à être consolidées avec les avancées du dispositif de suivi.
Le rapprochement des données relatives à la production et à la consommation fait apparaître un écart statistique de l’ordre de 12 000 tonnes.
Les ordres de grandeur présentés ici sont différents des évaluations réalisées par France Hydrogène et l’Institut français du pétrole et énergies nouvelles (IFPEN) car seul l’hydrogène pur est retracé. L’hydrogène faisant partie de mélanges de gaz est exclu même s’il est majoritaire dans leur composition.
Auteur : Virginie ANDRIEUX, SDES
Données
Données des graphiques présentés dans l'article.