Les zones humides en France - Synthèse des connaissances en 2021

Environnement
Publié le 24/03/2022
À l’interface des milieux terrestres et aquatiques, les zones humides sont des milieux dont le facteur déterminant commun est l’eau (douce, salée ou saumâtre) qui est retrouvée de façon permanente ou temporaire. De nombreuses plantes hygrophiles, lorsqu’elles existent, affectionnent ces milieux toute une partie de l’année. D’une richesse et d’une grande diversité, les zones humides accueillent de multiples espèces qui viennent se reposer, se nourrir ou se reproduire sur ces milieux dont elles dépendent.
At the interface of terrestrial and aquatic environments, the common feature of wetlands is fresh, salty or brackish water, either permanent or temporary. Many hydrophilic plants thrive in wetlands for a part of the year. A wide range of species depend on the rich and diverse ecosystems in wetlands using them to rest, feed and reproduce.

Étendue et types de zones humides

À l’heure actuelle, aucun inventaire national ne permet d’évaluer de manière précise et parfaitement exhaustive la surface des milieux humides et aquatiques continentaux sur l’ensemble du territoire français métropolitain et ultramarin.

Les travaux cartographiques les plus récents (2014, en cours d’actualisation) estiment que les milieux potentiellement humides couvrent environ 23 % du territoire métropolitain, soit près de 13 millions d’hectares.

Zones tampons entre le milieu aquatique et terrestre, les zones humides revêtent différents aspects : prairies, tourbières, marais, forêts alluviales, mares, rives des étangs et des cours d’eau dans la mesure où elles n’ont pas été domestiquées par l’Homme.

Des zones humides essentielles à la biodiversité et aux activités humaines

Lorsque les conditions générales de conservation le permettent, les zones humides fournissent de multiples services utiles aux équilibres naturels et aux activités humaines (rétention des crues, épuration de l’eau, réservoir de biodiversité, stockage de carbone, etc.). Leur existence présente un bénéfice de biens et services marchands pour les usagers qui se traduit, par exemple, par l’exploitation de ressources naturelles telles que les poissons ou encore, par le passé, la tourbe. S’ajoutent à cela d’autres services (valeurs récréatives, culturelles, patrimoniales, éducatives, esthétiques, scientifiques, etc.).

En France métropolitaine, ces territoires vulnérables accueillent 30 % des espèces rares ou menacées, la totalité des amphibiens, la moitié des oiseaux ou encore le tiers des espèces végétales remarquables. Le dernier suivi Wetlands International met en lumière cette forte dépendance. Entre 1980 et 2021, la présence des oiseaux d’eau hivernants réguliers (cygnes, oies, canards, plongeons, ardéidés, grèbes, rallidés et limicoles), comptabilisée sur les 533 principales zones humides françaises, a progressé de 124 %.

En plus d’être considérées comme les principaux réservoirs de biodiversité, les zones humides jouent un rôle dans la purification de l’eau qu’elles filtrent avant qu’elle n’atteigne les aquifères. On estime que leur pouvoir épuratoire permet à la société d’économiser annuellement 2 000 €/ha sur le traitement de l’eau potable.

Identifiées parmi les milieux les plus productifs biologiquement, elles jouent également un rôle essentiel dans l’approvisionnement des sociétés en fournissant des produits alimentaires issus de la pêche (poissons, huîtres, moules, coques, etc.), de l’agriculture (bovins, ovins, pâturages, riz, céréales, roseaux, joncs, etc.) et de la chasse. En France, les biens prélevés dans les milieux humides et aquatiques continentaux, principalement des poissons, représentent une valeur commerciale de l’ordre de 240 millions d’euros (étude Efese).

Parmi ces zones humides, les tourbières revêtent une importance particulière qu’il convient de préserver. Bien qu’elles ne couvrent aujourd’hui que 3 % de la surface de la Terre, elles stockent plus du double de carbone que toutes les forêts de la planète. Au même titre que les mangroves, herbiers marins et marais littoraux, elles participent ainsi grandement à l’atténuation de certains effets des changements climatiques.

Des milieux menacés

On estime qu’environ la moitié des zones humides françaises ont disparu entre 1960 et 1990 (urbanisation, drainages de terres). Depuis 1990, la reconnaissance des différents intérêts que peuvent revêtir ces milieux a permis un ralentissement de cette régression.

Dans le monde, 87 % des zones humides présentes au XVIIIe siècle sont aujourd’hui perdues. La part de leur surface disparaît trois fois plus vite que celle de la déforestation.

Interrogés dans le cadre de la dernière évaluation nationale des sites humides emblématiques sur la dynamique observée, les acteurs de terrain estiment que 41 % des sites humides emblématiques en France ont vu leur état se dégrader entre 2010 et 2020. Les sites de plaines intérieures et de vallées alluviales sont particulièrement concernés par cette tendance défavorable (respectivement 53 % et 49 % des sites en état dégradé ces dix dernières années) – (graphique 1).


Graphique 1 : proportion des sites humides emblématiques, par grand type, suivant l’évolution de l’état de leurs milieux humides, entre 2010 et 2020 en %

_ - © SDES
Notes : N = nombre de zones humides évaluées ; un état stable désigne un état dont les caractéristiques structurales du milieu et sa dynamique ne varient pas d'une période à l'autre. Pour autant, il peut comptabiliser des milieux dégradés qui n'évoluent pas. 

 

La dernière évaluation de la directive Habitats-Faune-Flore (période 2013-2018) confirme ces dires d’experts. Sur les 422 espèces et habitats remarquables des écosystèmes humides et aquatiques évalués, 15 % étaient dans un état de conservation favorable (38 % dans un état de conservation mauvais) – (graphique 2). La flore des milieux humides est particulièrement impactée (cas des sphaignes dans la région continentale, des lycopodes et des aches dans les régions continentales et atlantiques).

 

Graphique 2 : état de conservation des espèces et habitats remarquables sélectionnés pour les écosystèmes humides et aquatiques, entre 2013 et 2018 en %

Source : UMS PatriNat (AFB-CNRS-MNHN), 3e rapportage DHFF, 2019. - © Traitements : UMS PatriNat ; SDES
Note : analyse faite à partir de 422 évaluations (espèces et habitats) portant sur les écosystèmes humides et aquatiques.

Une meilleure information sur la richesse de ces milieux favorise leur protection

De nombreuses mesures existent aujourd’hui et participent à la conservation et à l’utilisation rationnelle des zones humides comme écosystème important à la fois pour la biodiversité et le bien-être des sociétés humaines.

Les outils nationaux et européens (parcs nationaux, réserves naturelles, arrêtés de protection, Natura 2000) ou encore la Convention Ramsar, traité international adopté en 1971, participent à cet effort de préservation de ces milieux remarquables. Sur les 2 431 sites Ramsar labellisés dans le monde (1 124 en Europe), la France en a désigné 51 pour une surface de plus de 3,7 millions d’hectares (3 fois la région Île-de-France), la Baie d’Audierne étant le dernier site à avoir été désigné (4 septembre 2021).

La restauration par les associations des zones humides au travers d’opérations de gestion, définies dans ou hors plan de gestion, permet à ces milieux de retrouver leur capacité de stockage de l’eau ou du carbone.

À titre d’exemple, sur les 91 055 hectares de mangroves sous juridiction française, 25 % font l’objet de mesure de conservation et parmi elles, 35 % sont protégées (graphique 3).

 

Graphique 3 : surfaces nationales des mangroves protégées faisant l’objet de mesures de gestion conservatoire, en outre-mer en ha

Champ : outre-mer. Source : Université de Nantes, 2018. - © Traitements : SDES, septembre 2019
Note : hors travaux spécifiques : les territoires de Wallis et de Saint-Barthélemy faisant l'objet de travaux spécifiques sur leurs mangroves ne sont pas comptabilisés dans la valeur de l'indicateur.

 

L’essor des sciences participatives qui permettent au citoyen de se sentir acteur dans la préservation des zones humides et le renforcement des actions de sensibilisation du grand public au travers de grands événements, tels que la Journée mondiale des zones humides, la Fête des mares ou encore Fréquence Grenouille (nombre d'animations sur les zones humides multipliées par 4 entre 2004 et 2020) contribuent à une prise de conscience collective de ces enjeux (graphique 4).

 

Graphique 4 : animations proposées dans le cadre des trois principaux événements annuels en nombre

Sources : Ramsar-France : Journée mondiale des zones humides ; SNPN : Fête des mares ; FCEN : Fréquence Grenouille. - © Traitements : SDES, janvier 2021
Note : alors qu’en année normale, la quasi-totalité des animations proposées ont bien lieu, en 2020 en raison de la pandémie, beaucoup ont été annulées. Dans le cadre de la Fête des mares, sur un échantillon de 18 animations ayant fait l’objet d’un retour, seules 12 ont eu lieu.

21 fiches thématiques pour dresser le bilan environnemental de la France

Cet article fait partie de la publication "Bilan environnemental de la France - Édition 2021" qui propose une vue d'ensemble des dépenses de protection de l’environnement, ainsi qu’un aperçu de l’état des écosystèmes et des interactions entre l’environnement et l’économie.

21 fiches thématiques abordent les grands enjeux et l’état des connaissances des principaux domaines environnementaux : milieux naturels, exposition aux risques, économie verte, consommation de matières, émissions de gaz à effet de serre, énergies renouvelables, etc.

Ce panorama, au travers d’indicateurs physiques et monétaires, mobilise de nombreuses sources et met en perspective les évolutions récentes sur ces domaines.

Consulter le Bilan environnemental de la France - Édition 2021

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